Introduction
La maladie du foie gras associée à une dysfonction métabolique (MASLD) et le diabète de type 2 (T2DM) sont deux troubles métaboliques prévalents qui coexistent souvent et contribuent de manière synergique à la progression de l’un et de l’autre. Plusieurs voies physiopathologiques sont impliquées dans cette association, notamment la résistance à l’insuline, l’inflammation et la lipotoxicité, fournissant une base pour comprendre les interrelations complexes entre ces conditions. La présence de MASLD a un impact significatif sur le risque de diabète et le développement de complications microvasculaires et macrovasculaires, et le diabète contribue de manière significative à un risque accru de progression de la fibrose hépatique dans le MASLD et au développement du carcinome hépatocellulaire. De plus, les deux pathologies ont un effet synergique sur les événements cardiovasculaires et la mortalité.
Section 1 : Relation entre MASLD et T2DM
Le MASLD est caractérisé par la présence de macrostéatose hépatique dans plus de 5 % des hépatocytes. Sa prévalence augmente dans les conditions impliquant une résistance à l’insuline, telles que l’obésité, le diabète de type 2 (T2DM) et le syndrome métabolique. Le MASLD se présente fréquemment comme une maladie bénigne avec un faible impact sur la fonction hépatique (75−80 %), cependant, dans 20−25 % des cas, il se présente sous forme de stéatohépatite associée à une dysfonction métabolique (MASH), qui représente un phénotype fibro-inflammatoire pouvant évoluer vers la cirrhose hépatique et augmenter la mortalité liée au foie.
Le MASLD et le T2DM sont actuellement dans une situation de pandémie mondiale associée à des charges et des coûts élevés pour la santé publique. La prévalence mondiale du T2DM était estimée à 529 millions d’individus en 2021, affectant 10,5 % de la population adulte. De plus, la prévalence devrait augmenter pour atteindre 1,23 milliard d’ici 2050. Malheureusement, une grande proportion des sujets atteints de T2DM ne sont pas diagnostiqués, et plus de 50 % des patients diagnostiqués présentent un contrôle métabolique sous-optimal.
Section 2 : Voies pathogéniques impliquées dans l’interaction synergique
La résistance à l’insuline est le principal moteur du MASLD et du T2DM. Sa présence est sine qua non pour les deux maladies. Dans le foie, la résistance à l’insuline se manifeste principalement par une régulation perturbée des voies métaboliques du glucose, telles que l’augmentation de la néoglucogenèse et de la glycogénolyse et la diminution de la synthèse du glycogène. En conséquence directe, une hyperglycémie se développe, et les cellules bêta pancréatiques répondent en augmentant la sécrétion d’insuline pour maintenir le contrôle glycémique.
Section 3 : Implications cliniques de l’association MASLD et T2DM
Les cliniciens doivent être conscients des conséquences de l’association symbiotique entre le T2DM et le MASLD. En raison de la haute prévalence et des implications multisystémiques, leur gestion ne devrait pas être limitée aux spécialistes du foie ; au contraire, elle devrait être étendue aux médecins généralistes, internistes, cardiologues, diabétologues et endocrinologues, entre autres spécialités. La surveillance active avec des tests de glucose à jeun et d’HbA1c devrait être incluse pour les patients atteints de MASLD.
Surveillance du T2DM chez les patients atteints de MASLD
En raison du risque accru de 2 à 3 fois d’incidence du diabète chez les patients atteints de MASLD, la plupart des directives recommandent le dépistage du T2DM chez les patients atteints de MASLD. Le diagnostic de T2DM a des implications pour la progression de la fibrose hépatique dans le MASLD et le risque de carcinome hépatocellulaire (CHC). Le contrôle glycémique du T2DM pourrait jouer un rôle protecteur dans la progression du MASLD.
Section 4 : Interventions thérapeutiques pour le T2DM et le MASLD
Les interventions sur le mode de vie sont le traitement de base pour le T2DM et le MASLD. La perte de poids est l’objectif principal pour les patients en surpoids et obèses. Une réduction de poids de plus de 7 % est associée à une résolution de la MASH dans 64 % des cas, et une réduction de poids de plus de 10 % est associée à une résolution de la MASH dans 90 % des cas et à une régression de la fibrose hépatique dans 81 % des cas. L’exercice est également recommandé pour compléter l’intervention nutritionnelle car il a démontré un effet additif sur les tests de fonction hépatique et la résistance à l’insuline.
Prévention des maladies cardiovasculaires
La prévention des événements cardiovasculaires est un objectif majeur pour le traitement des sujets atteints de T2DM. Le contrôle des multiples facteurs de risque cardiovasculaire associés au T2DM et au MASLD (pression artérielle, HbA1c, cholestérol sanguin, tabagisme) est d’une importance significative car il peut réduire les événements cardiovasculaires d’environ 62 %. Un traitement agressif de l’hypertension et de la dyslipidémie est recommandé.
Chirurgie bariatrique
Chez les patients obèses atteints de T2DM ou de MASLD à haut risque, la chirurgie bariatrique peut induire une perte de poids majeure et soutenue. Les effets métaboliques de ce type de chirurgie améliorent significativement le contrôle glycémique chez les patients atteints de T2DM. Les sujets présentant un indice de masse corporelle supérieur ou égal à 40 kg/m2 ou supérieur ou égal à 35 kg/m2 avec des comorbidités (T2DM ou pré-diabète, hypertension non contrôlée, arthrose de la hanche ou du genou, incontinence urinaire) avec une réponse inappropriée au mode de vie et à la thérapie médicale sont considérés comme des candidats pour la chirurgie bariatrique.
Traitement pharmacologique pour le MASLD
Actuellement, aucun médicament pour le MASLD n’a été recommandé spécifiquement pour la thérapie du MASLD, bien que certains médicaments aient été étudiés dans des essais contrôlés randomisés. Plusieurs nouveaux médicaments sont en développement ; certains d’entre eux sont actuellement étudiés dans des essais de phase 3 : resmetirom (un agoniste du récepteur thyroïdien b), semaglutide (agoniste du GLP-1) et lanifibranor (agoniste pan PPAR).
Traitement pharmacologique pour le T2DM chez les patients atteints de MASLD
Les patients atteints de T2DM peuvent bénéficier de médicaments qui peuvent potentiellement avoir des effets positifs sur le MASLD et la maladie hépatique. La metformine est la thérapie pharmacologique de première ligne pour le T2DM ; cependant, un effet direct sur l’histologie du MASLD n’a pas été démontré. La pioglitazone a démontré une augmentation de la résolution de la MASH et une réduction de la progression de la fibrose chez les sujets atteints de MASLD et de T2DM ou de prédiabète. Les agonistes des récepteurs du peptide-1 de type glucagon (GLP-1RA) ont des effets bénéfiques tels que la perte de poids et la réduction du risque cardiovasculaire chez les patients diabétiques.
Conclusion
Cette revue éclaire la relation complexe entre le T2DM et le MASLD, détaillant leurs mécanismes physiopathologiques partagés et l’impact mutuel sur la progression de l’un et de l’autre. La coexistence de ces conditions pose des défis significatifs dans la gestion des patients, soulignant la nécessité d’approches intégrées. Les modifications du mode de vie, y compris la gestion du poids et l’activité physique, émergent comme des piliers centraux dans la prévention et la gestion des deux conditions. Les thérapies GLP-1 RA et pioglitazone ont été incluses dans les directives récentes pour le traitement des sujets atteints de T2DM et de MASLD. La gestion agressive des facteurs de risque cardiovasculaire est nécessaire pour réduire la mortalité. De plus, les avancées dans les interventions pharmacologiques promettent de traiter les voies métaboliques complexes impliquées.
Alors que la recherche continue de dévoiler les complexités moléculaires du T2DM et du MASLD, les stratégies thérapeutiques doivent évoluer, en se concentrant sur des approches personnalisées qui prennent en compte les composantes chevauchantes de ces maladies et leurs complications extra-hépatiques. Une compréhension holistique des connexions entre le T2DM et le MASLD est essentielle pour concevoir des interventions efficaces qui améliorent les résultats des patients et réduisent le fardeau mondial de ces troubles métaboliques.
Références
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